Écosse - Une colonie viking tournée vers l'agriculture et l'artisanat à Lephin, sur l'île de Mull

Le 04/10/2022
Dans Archéologie
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Il y a 3 ans, les artefacts découverts à Lephin ont confirmé la présence d'une colonie viking sur l'île de Mull au XIème siècle. Une nouvelle campagne de fouilles a eu lieu cette année, au cours de laquelle les archéologues écossais ont notamment investigué deux monticules susceptibles d'abriter des bateaux-tombes de l'Âge Viking.

Les fouilles ont duré près de deux semaines, du 11 au 23 Septembre. Organisées par le musée de Mull et dirigées par le Dr Clare Ellis, elles ont mobilisé des archéologues du groupe Argyll Archaeology, ainsi que des bénévoles de toute la région pour aider à creuser de petites tranchées. L'un de leurs objectifs était l'exploration de deux monticules de forme allongée près de Lephin afin de déterminer s'il s'agit d'un relief naturel ou bien de sépultures recouvrant des bateaux-tombes.

Jusqu'à présent, le bateau-tombe d'Ardnamurchan [Lire sur Idavoll: Ecosse - Un guerrier viking de haut rang enterré dans un bateau tombe découvert intact] mis au jour en 2011 reste l'unique sépulture de ce type dans le sud de l'Écosse. "Ce serait passionnant qu'elle ne soit pas la seule et que [ces enterrements] aient eu lieu régulièrement tout le long de la côte", a déclaré Clare Ellis.

Des agriculteurs et des artisans

Les précédentes fouilles, menées en 2018 et 2019 à Lephin, dans le secteur de Glengorm sur l'île de Mull, ont permis la découverte d'un établissement nordique datant probablement de la fin du Xème ou début du XIème siècle. Avant cela, seul le nombre élevé de toponymes dérivés du vieux norrois laissait supposer l'existence d'une colonie viking.

Il s'agit en outre d'une découverte très rare, étant donné qu'un seul bâtiment de cette époque avait été partiellement fouillé à Baliscate, également sur l'île de Mull, et quelques autres éparpillés dans les Hébrides extérieures.

Le site de Lephin comprend plusieurs bâtiments, construits essentiellement en tourbe avec une utilisation minimale de bois, entourés d'une grande enceinte ou peut-être une clôture en bois. Il y a également les vestiges d'un grand foyer qui devait se trouver au centre d'une maison longue et autour duquel se déroulait la vie quotidienne. Une des personnes qui a vécu à cet endroit était un artisan qualifié, qui fabriquait de beaux objets décorés comme le prouve la découverte d'un peigne et d'un étui en bois de cerf ouvragés, ainsi qu'un couteau artisanal spécifique qui pourrait avoir été utilisé pour les réaliser.

Les occupants de la maison travaillaient également le métal et aiguisaient leurs outils en fer à l'aide de pierre à aiguiser. Qui plus est, ces personnes fabriquaient leur propre poterie et étaient des agriculteurs chevronnés, qui cultivaient plusieurs variétés de plantes et récoltaient des aliments sauvages tels que des noisettes. Entre le type d'outils utilisés, le style de décoration du peigne et celui de l'étui en bois de cerf, le Musée de Mull estime que les habitants de Lephin étaient d'origine scandinave, des immigrants ou colons vikings venus s'installer là.

Une ferme prospère dans le temps

La colonie scandinave a été remplacée par une structure rectangulaire en pierre et en tourbe à la fin du XIIème siècle ou au début du XIIIème. Mais au regard de la subtilité du changement dans la technique de construction, les personnes qui ont occupé la nouvelle ferme devaient être apparentées à celles de l'ancienne colonie nordique.

Les trous laissés dans le sol par une série de poteaux installés autour des murs intérieurs indique qu'ils servaient sans doute à soutenir un toit en bois. À l'intérieur de la structure, les archéologues ont répertorié une série de dépôts dans lesquels ont été trouvés des grains de céréales carbonisés, des scories, des objets métalliques et des fragments de poterie. Il ressort clairement des preuves archéologiques que la ferme de Lephin à cette époque était plutôt prospère et ses habitants largement autosuffisants.

Cette ferme a été reconstruite entre la fin du XIVème et le début XVème siècle. Des trous de poteaux supplémentaires et une rigole ont également été enregistrés en dessous, scellés par les dépôts de la couche inférieure du sol, ce qui signifie qu'il existe une structure antérieure (possiblement nordique) sous la structure principale, bien que les archéologues ne disposent d'aucune preuve de datation immédiate. Une sépulture, datant du XVIIème ou XVIIIème siècle a également été mise au jour sous les décombres de la structure principale.

De nombreuses découvertes

Avec cette nouvelle campagne, Clare Ellis a exprimé le souhait de trouver davantage d'artefacts et de structures nordiques à Lephin. Le site offre une opportunité passionnante de comprendre comment ce type de colonie agricole était aménagée, à quoi ressembait notamment cette clôture ou palissade de bois qui entourait les bâtiments, comment les gens y travaillaient et comment ils furent enterrés.

Toutefois, son espoir de découvrir un bateau-tombe a été anéanti puisque les potentiels tertres funéraires se sont avérés être des formations géologiques de la dernière période glaciaire, ce que les chercheurs avaient anticipé comme une explication possible. Ses collègues et les bénévoles ont néanmoins fait de nombreuses découvertes, parmi lesquelles d'autres morceaux de peignes en os d'origine scandinave et de nombreuses pièces de poterie. Les objets ont été envoyés au musée pour y subir des analyses approfondies et être plus précisemment datés.

Hylda Marsh, membre du comité d'Archéologie du Musée de Mull qui supervise l'organisation du chantier, est en charge de la collecte de fonds qui a servi à financer les fouilles. Elle indique que ce financement participatif a été maintenu dans le but de couvrir les coûts d'études et de publication des résultats. "Il n'y a jamais eu de fouilles de bâtiments nordiques dans cette partie de l'Écossse, nos dévouvertes permettront donc d'enrichir les connaissances et les informations sur les habitations et les ateliers de l'époque".